La viticulture



Auteur : Jean Clavel, Manuel Ibanez
Date : novembre 2013


La monoculture viticole s’installe dès le XIXe siècle sur le territoire, principalement dans les plaines et bassins, produisant d’importants volumes. Les crises successives, sanitaires et économiques, accentuent l’abandon des zones de garrigue qui ne sont reconquises que plus récemment sur les coteaux avec le développement de démarches qualitatives.


Éléments historiques de la viticulture en garrigue


L’héritage romain et le développement des abbayes
Dès le premier siècle avant J.- C., la viticulture romaine s’installe le long de la voie Domitienne, le plus souvent en limite du territoire
des garrigues. En 313 l’édit de Milan, signé par l’empereur Constantin, donne aux Chrétiens l’autorisation de célébrer leur culte. La civilisation chrétienne peut se développer et en 782, Witiza, né à Sextantio (Castelnaule-Lez) et devenu Saint-Benoît d’Aniane, crée la première abbaye bénédictine à Aniane, origine d’un important réseau de grandes abbayes, favorisées par Charlemagne. Ces abbayes, ainsi que leurs filiales plus locales, possèdent leur propre vignoble, le vin ainsi que le pain étant le fondement des rites religieux. Ces vignobles se situent d’abord dans la continuité des vignobles romains, puis se développent aussi dans des zones nouvellement défrichées. Les abbayes cisterciennes comme celle de Valmagne développent plus tard leur vignoble qui devient un exemple pour la région. L’ abbaye de Valmagne avait un vignoble à base de morrastel, cépage qui, après avoir disparu, se développe à nouveau de nos jours.

Le commerce international de vins et eaux-de-vie avec la marine de commerce
Vers 1660, des vignobles aux produits destinés à la distillation se constituent à base des cépages les plus productifs, aramon, carignan, terret. À partir de 1680, Sète commence à expédier vers la Hollande. Petit à petit les Hollandais deviennent les maîtres du commerce régional. La diversification des productions s’affirme. Les Picardans, vins blancs produits à partir du cépage clairette, connaissent une expansion rapide. Après des débuts timides, les eaux-de-vie que l’on disait à la “Preuve de Hollande“ connaissent également un succès commercial. Les Hollandais provoquent une demande importante, ces eaux-de-vie sont chargées sur les bateaux de la flotte nationale et servent, en partie, à couper l’eau de boisson des marins. C’est l’époque de la marine de commerce à voiles et des grands et longs voyages vers les Amériques et les Indes par le cap de Bonne Espérance. Les ateliers de distillation se développent dans de nombreux villages. L’Intendant du Languedoc décrit les liqueurs
que l’on vendait alors de tous côtés. Les eaux de la reine de Hongrie (eau-de-vie parfumée à la fleur de romarin), eau de cannelle, eau de Cette (Sète), eau de Grenade. Le développement du commerce international des vins et eaux-de-vie, principalement par le port de Sète, a été permis par la mise en place au XVIIIe siècle de règles de production et de mise en marché, et de services de contrôle. La création d’un service d’inspection pour vérifier la qualité des vins et eaux-de-vie, avec certification par apposition sur les barriques d’une marque à feu, est une étape
importante dans la construction d’une image internationale de qualité et de fiabilité des vins et eaux-de-vie du Languedoc. Dès cette époque, des communes vigneronnes ont acquis une renommée qui perdure encore aujourd’hui.

La viticulture, inscrite dans la polyactivité des garrigues, se transforme en une monoculture spécifique


Les garrigues languedociennes ont connu d’autres activités dont l’élevage ovin très développé aux XVIIIe et XIXe siècles, avec la transhumance
vers les estives, qui entretient ainsi les drailles * pour le passage des troupeaux regroupant parfois plusieurs milliers de têtes. Pendant ces estives les vignerons sortaient le fumier des bergeries d’hiver, afin d’enrichir les terres pauvres des vignes de garrigue. En outre, l’exploitation des bois de chênes verts entraînait des migrations importantes dans certains secteurs. Ainsi le village des Matelles organisait l’accueil de familles italiennes, qui coupaient les chênes, produisaient du charbon de bois,et confectionnaient les fagots de branchages destinés aux boulangers de Montpellier pour chauffer leurs fours. Les vignerons qui possédaient des chevaux assuraient ce transport vers la ville et complétaient ainsi leur revenu. Dès 1855, Montpellier est relié par le train à Bordeaux et, via Lyon, à Paris. Les coûts de transport sont très fortement réduits, ce qui ouvre la production viticole régionale aux marché national. La monoculture viticole languedocienne se développe. Elle concentre rapidement les moyens humains et financiers. Les progrès techniques (mécanisation, engrais chimiques...) la rendent indépendante des autres activités des garrigues.

La crise du phylloxéra, particulièrement désastreuse pour les vignobles des coteaux et garrigues


En 1863 apparaissent les premiers signes du phylloxéra. Un mal mystérieux, venu d’Amérique, frappe les vignobles de la rive gauche du Rhône. L’inquiétude augmente, un nouveau foyer se déclare à Roquemaure sur la rive droite. Une commission d’enquête composée de MM. Bazille, Planchon et Sahut, scientifiques montpelliérains, est constituée à la demande des élus locaux. Le professeur Planchon découvre un insecte jaunâtre fixé au bois et suçant la sève. Pendant trois jours, des milliers de pucerons sont découverts à tous les stades de développement. Cette
espèce est décrite en 1868 sous le nom de “Phylloxera vastatrix” (phylloxera : feuille sèche en grec ; vastatrix : dévastateur en latin). Il va
détruire progressivement la quasi-totalité des vignobles de l’Europe. Cependant il va le faire de façon progressive ce qui entraîne à la fois la ruine des vignerons dont les vignes sont atteintes en premier et la fortune des autres, ceux épargnés, qui ont pu attendre sans trop de dommages que les chercheurs aient découvert des moyens de lutte efficaces et économiquement supportables. En 1875, c’est la plus importante récolte de tous les temps en France, avec 84 millions d’hectolitres, vendus au prix moyen de 16 francs l’hl. Et pourtant en 1876, le vignoble de l’arrondissement de Montpellier est entièrement détruit, toutefois il ne régressera dans l’Aude qu’en 1885. Cette situation permet aux propriétaires viticulteurs de l’ouest de planter massivement dans des localisations où le phylloxéra peut être contenu, par exemple les plaines inondables ou les sables littoraux. Dans le sud de la France 40 000 ha. de vignes sont submergés et 20 000 ha. de vignes des sables sont plantés entre 1870 et 1900.
La situation est différente sur le territoire des garrigues, dans le Gard et l’est de l’Hérault. Les vignerons échouent dans les premières tentatives de lutte contre le phylloxéra, et ayant épuisé leurs ressources, ne peuvent pas financer le réencépagement, lorsque les solutions ont été mises au
point et sérieusement expérimentées. Financé par la Société Centrale d’Agriculture et le Conseil Général de l’Hérault, le Professeur Planchon part aux États- Unis en juillet 1873 et en revient avec une collection de vignes américaines installée à l’École d’Agriculture de Montpellier. Des viticulteurs tentent immédiatement l’expérience du greffage, grandeur nature. Vialla président de la Société Centrale d’Agriculture installe le premier vignoble greffé dans son domaine du Mas de Saporta à Lattes. C’est un succès. Dans la dernière décennie du XIXe siècle, le vignoble se reconstitue. Mais les conséquences sur les vignobles de garrigues et de coteaux sont irréversibles et toute la diversité des cépages des vignobles de qualité est détruite. La reconstitution est plus difficile que dans les plaines. Les premiers porte-greffes américains ne résistent pas au sol calcaire de certains coteaux et les greffages en place, pratiqués alors, sont plus délicats en terrains caillouteux. Quand on peut replanter, on greffe les cépages les plus productifs des plaines (aramon, carignan, ainsi que métis bouchet, ce dernier donnant de la couleur au vin), sans tenir compte de la qualité.
Le phylloxéra a profondément marqué l’évolution du vignoble languedocien. Sa reconstitution permettra de développer les vins de coupage à bas prix qui seront vendus en masse à la consommation populaire. La production viticole régionale augmente très rapidement, mais essentiellement par la replantation des plaines irriguées très productives ; la surproduction menace. En 1907 des séries de manifestations de masse de viticulteurs sont organisées partout, de Perpignan à Nîmes et Montpellier. Des régiments venant d’autres régions de France sont déployés pour les réprimer. Après de violents affrontements, une réglementation sur les fraudes dont les viticulteurs se disent victimes est mise en place.

La coopération viticole : une idée née en garrigue et qui s’épanouit dans les plaines du Languedoc


Ce sont des petits vignerons qui sont à l’origine de la coopération viticole. Ils exploitent quelques parcelles ingrates gagnées sur les garrigues. Ils ne possèdent pas les installations nécessaires pour une vinification et une conservation convenable des vins. Charles Gide et l’École de pensée de Nîmes proposent à la fin du XIXe siècle un circuit direct entre des coopératives de producteurs rassemblant leurs produits et des coopératives de consommateurs dont le mouvement est naissant. Cette dynamique s’appuie alors sur des structures coopératives, mais seulement d’un point de vue juridique et connaît alors de nombreuxéchecs notamment à cause d’un manque de régularité dans la qualité des produits. Une deuxième génération de coopératives, moins axées sur le lien entre producteurs et consommateurs mais plutôt sur la mise en commun de moyens pour améliorer l’efficacité de la vinification et de la vente, vit ensuite le jour. Ces nouvelles coopératives connurent un succès rapide. Il s’agissait d’apporter à la coopérative les raisins produits pour les vinifier en commun et réaliser la vente des produits. Au début chaque viticulteur était libre de vendre en fonction des offres d’achat qui étaient faites à la cave coopérative, puis petit à petit les ventes ont été réalisées en commun par la cave coopérative dans l’intérêt général des adhérents. Ces premières grandes coopératives furent construites dans l’ouest héraultais et dans les
plaines, comme la cave de Marsillargues qui présente dès 1913 une technologie de pointe. Les caves coopératives constituent alors une avancée sociale, économique, humaine et technologique considérable. Chacun des vignerons regroupés utilisait naguère des méthodes et des installations archaïques pour des résultats aléatoires, conduisant à des produits fragiles qu’il fallait vendre au plus tôt. La cave coopérative leur offrait la sécurité (car le vin était bien logé et sous surveillance), la capacité de discussion avec le négoce et la fierté d’appartenir au groupe le plus en avance dans la dynamique sociale et économique de l’époque. Au début, seuls les petits producteurs étaient intéressés et la coopérative leur permit de maintenir leur exploitation. L’aspect social domina ainsi la gestion. Mais la contrepartie de ces avantages fut l’uniformisation des produits
et l’absence de motivation des adhérents pour l’élaboration de vins de qualités différentes s’adressant à d’autres types de consommateurs,
ce qui impliquait un changement des cépages et d’autres disciplines de production. La mutation du marché de consommation des années 1970 ne fut assumée que par quelques caves de coteaux et de garrigues comme Montpeyroux, Saint-Georges-d’Orques, Saint-Geniès-des-Mourgues, Montaren-Saint-Médier ou Lirac.
Sur le territoire des garrigues, le phénomène de la coopération viticole fut moins important que dans les grandes plaines languedociennes. Néanmoins, au total 132 caves coopératives y furent construites de 1902 à 1980. En 2011 il en restait 70 en activité, cette situation est provisoire,
car de nombreuses caves coopératives sont en fin de vie, beaucoup d’adhérents sont sans successeur, d’autres rejoignent des caves coopératives plus dynamiques ou créent leur propre cave personnelle.

L'objectif de la qualité accompagne le retour de la vigne en garrigue


Réinstallation en garrigue par des rapatriés d’Algérie
Dans les années 1960, l’arrivée d’agriculteurs rapatriés d’Algérie entraîne de nombreuses réinstallations dans le territoire des garrigues. Des défrichements mécaniques et des réimplantations viticoles sont entrepris, entraînant de vraies réussites et servant d’exemple pour de nouveaux viticulteurs. Ces initiatives ont été nombreuses dans les garrigues au nord de Nîmes, puis, dans le secteur du Pic Saint-Loup. Des landes incultes et rocheuses ont été concassées puis des vignes plantées sur de nouveaux espaces. La SAFER (Société d’Aménagement Foncier et d’Établissement Rural) utilisant les compétences d’ingénieurs agronomes rapatriés, spécialistes en défense et restauration des sols, a réalisé
d’importants chantiers de défrichement en garrigues qui ont permis des plantations dans de nouveaux secteurs classés en appellation, comme Combaillaux.

La démarche de requalification : une dynamique européenne
La Politique Agricole Commune (PAC) a été développée en Union Européenne à partir de 1962. À l’origine, concernant les vins, elle comprenait
deux catégories principales, les vins de table, soumis à une réglementation et un financement spécifique, et les VQPRD (vins de qualité, produits dans des régions déterminées) qui reprenaient les règles de production des AOC de France (qui eux restaient sans financement européen). La majorité des vins produits en Languedoc-Roussillon relevait de la catégorie des vins de table, et ont obtenu, à ce titre, un financement complexe et important, provoquant des effets d’aubaine chez certains producteurs et caves coopératives, retardant la nécessaire adaptation des productions aux marchés national et international.
Le compromis de Dublin du 27 février 1985, concernant l’adaptation de la PAC pour permettre l’adhésion à l’Union Européenne de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce, obligea la France à changer de politique viticole, en plusieurs étapes, pour une politique de qualité et non plus de quantité. La dernière étape de ce changement de politique viticole a eu lieu le 19 décembre 2007 et a conduit la France à adopter les principes européens dans la conduite de sa politique viticole. Ont été alors différenciées deux grandes catégories de vins :
- les vins avec indication géographique (IG), comprenant deux sortes de vins sous le contrôle de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la Qualité, qui gère tous les labels agro-alimentaires), les vins AOP (Appellations d’Origine Protégée) et les IGP (Indication Géographique Protégée), remplaçant les vins de pays et assortis de règles proches de celles des AOP ;
- les Vins Sans Indication Géographique (VSIG), anciens vins de table, aux règles libérales de production, destinés aux marchés très concurrentiels, ne peuvent mentionner sur l’étiquette que l’année de récolte, le nom commercial du vin et les cépages le composant (ainsi que la mention “vin de France”).
Ces nouvelles règles sont conformes aux engagements européens dans le cadre de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). Dès 1985, ces initiatives vers une politique qualitative ont eu des conséquences importantes pour les vignobles des coteaux, garrigues et soubergues *, sur lesquels sont localisées les appellations : modification importante dans l’encépagement, qualité des cépages et conduite de la vigne, classement en AOP de nombreuses appellations, recherche d’une hiérarchisation des productions, nouvelles appellations comme Les Grès de Montpellier,
(45 communes) ou le Duché d’Uzès (77 communes), investissements qualitatifs dans les caves, dans le vignoble, dans les compétences des personnes, mutation progressive des exploitations vers la production de vin biologique, défini maintenant au plan européen, et développement des marchés, national, européen et mondial. Les caves coopératives regroupées ont adapté leur gestion aux marchés internationaux. Les résultats économiques commencent à se manifester et sont à la mesure des efforts consentis.

Description de quelques appellations :


Languedoc-Terrasses du Larzac
Ce terroir s’étend au pied du Causse du Larzac, sur les terrasses calcaires des hautes garrigues traversées par les gorges de l’Hérault. La proximité des reliefs d’altitude apporte des courants d’air frais. En parallèle, l’exposition permet un ensoleillement généreux. Ceci favorise des
amplitudes thermiques très importantes notamment entre le jour et la nuit. Ces vignes perchées s’insèrent dans des garrigues plus ou moins boisées. Les vins qui y sont produits sont d’ailleurs caractérisés par leurs arômes dits de “garrigues” tels que le Laurier, le Thym... Une démarche de reconnaissance en Cru Terrasses du Larzac est en cours.

Languedoc-Grès de Montpellier
Des productions viticoles du secteur sont reconnues depuis le Moyen Âge, comme les vins du château de Flaugergues (Montpellier), de Saint-Georges-d’Orques, de Saint-Christol, ou de l’Abbaye de Valmagne. Le Syndicat des Grès de Montpellier est créé en 1993, il engage une démarche d’identification de terroir dans le cadre de la hiérarchisation des Coteaux du Languedoc, avec une première étape en 1997, qui est reconnue par décret du 11 mars 2003, le nom est alors : “Coteaux du Languedoc-Grès de Montpellier”, devenu maintenant : “Languedoc-Grès de Montpellier”. Le terme Grès, est employé dans la tradition locale pour définir un terrain pauvre et caillouteux. Les limites du territoire ont été définies par les gradients de température moyenne et l’indice de pluviométrie par les limites de la vallée de l’Hérault à l’ouest et la vallée du Vidourle à l’est. La pluviométrie moyenne, ainsi que l’amplitude des températures entre le jour et la nuit changent nettement dès qu’on s’approche du Pic Saint-Loup. Les communes les plus proches de Montpellier subissent la pression foncière de l’agglomération et l’activité viticole se réduit
progressivement, pour laisser place à l’urbanisation rapide.
Les vins rouges Grès de Montpellier ont une robe rubis profond, signe d’une structure puissante. Ils ont des arômes complexes exprimant
des notes de fruits rouges, de griottes, de garrigue, avec un équilibre dans l’expression, entre puissance et élégance, aux tanins fins et soyeux.

Languedoc-Le Pic Saint-Loup
La singularité du terroir du Pic Saint-Loup tient notamment à son histoire géologique marquée par un phénomène tectonique d’effondrement datant de l’Oligocène (il y a environ 30 millions d’années). Ce dernier est à l’origine d’une topographie (rebords du
Causse de l’Hortus, collines et combes orientées nord-est - sud-ouest), de types de sols (versants d’éboulis calcaires et combes argilo-calcaires) et d’un micro-climat particuliers, facteurs de typicité des vins produits.
Si à la fin du XIXe siècle, ce terroir est planté majoritairement d’aramon, de carignan pour 25% et de métis bouchet, alicante et autres (vins rouges), l’encépagement est complètement transformé en 2010. On y trouve aujourd’hui en AOC, en cépages rouges, principalement de la syrah, du mourvèdre, du grenache et quelques carignans et cinsault. La mutation de l’AOC Languedoc-Pic Saint-Loup vers le Cru Pic Saint-Loup se poursuit, avec révision des aires de production pour un plein exercice vers 2014.

Languedoc-Sommières
Niché à l’ouest du département du Gard, le terroir “Sommières” sera prochainement reconnu par l’INAO, comme dénomination de l’AOC
Languedoc, après avoir complété la réglementation régionale par des conditions de production locales spécifiques. Le vignoble côtoie partout les oliviers, la garrigue et les chênes truffiers. Ici, les vins rouges se caractérisent par une robe sombre, des arômes complexes mariant souvent
fruits mûrs, épices et garrigue, et une charpente qui nécessite plus d’un an d’élevage.
Les vins de Langlade sont historiquement reconnus. Ils sont servis sur les tables des papes d’Avignon, princes et seigneurs du Languedoc, de la Provence, et des rois de France et d’Aragon. Certains auteurs du XIXe siècle n’hésitent pas à considérer la commune de Langlade comme l’égale de Tavel, Chusclan, Mercurey ou encore Julienas…
Les parcelles AOC Sommières sont constituées par des formations d’origine secondaire et tertiaire. On trouve des cailloutis sur calcaires durs, des calcaires tendres, des sols marneux, des éboulis et des argiles à silex.
L’association des températures et des précipitations influe sur la végétation naturelle de “Sommières”. Les paysages sont soulignés par le Pin d’Alep, le Chêne vert et le Chêne blanc, présents notamment sur les terrains marno-calcaires. Au fond de la vallée coule le Vidourle, qui passe sous le pont romain de Sommières. La culture du chêne truffier et de l’Olivier marque également le territoire : sur toutes les communes du terroir Sommières, les vignerons peuvent aussi produire l’AOC “Huile d’Olive de Nîmes” essentiellement avec l'olive Picholine.

Le duché d’Uzès
Le terroir du Duché d’Uzès se caractérise par une vaste zone de coteaux argilocalcaires s’étendant de l’Uzège au Piémont cévenol entre les massifs des garrigues de Nîmes, le Bois des Lens et les garrigues de Lussan. Il est traversé par le Gardon qui serpente du nordouest vers le sud-est. Le climat y est dit de transition entre les influences des reliefs cévenols et le relatif éloignement du littoral. Il est fait mention de “vins nobles” sur ce territoire dès le XVe siècle. L’appellation “vins de Pays d’Uzès” renommé ensuite “Duché d’Uzès” va amener à une restructuration importante du vignoble dans les années 1990 avec notamment un encépagement strictement méditerranéen. L’identification précise du terroir a permis d’aboutir à une reconnaissance toute récente en AOC.

Tavel
Sur le rebord oriental du territoire, entre garrigue et coteaux du Rhône, se loge le terroir de Tavel. Plusieurs types de sols s’y rencontrent : “terres blanches” issues de colluvions récentes, versants et vallons sableux, terrasses de galets mais aussi zones argilo-calcaires à l’ouest du village, plus caractéristiques des garrigues. Le climat y est marqué par la forte présence du mistral comme dans toute la vallée du Rhône. La notoriété du vignoble de Tavel est ancienne et n’a cessé de croître depuis le XIXe siècle. L’appellation d’origine contrôlée est réservée aux seuls vins rosés.

Analyse géographique de la production


Le vignoble recouvre plus de 16% de la surface du territoire des garrigues et la production de vin en 2011 s’élève à plus de 3 millions d’hectolitres.
Les grandes zones viticoles du territoire des garrigues sont :
- les bordures du territoire en coteaux : les abords de la vallée de l’Hérault, du Causse d’Aumelas, de la Gardiole et de la plaine de Fabrègues au sud-ouest, le Bagnolais et les coteaux du Rhône à l’est, les abords de la Vistrenque et de la plaine de Lunel au sud ;
- les bassins et vallées alluviales situés au coeur du territoire comme la Gardonnenque, l’Uzège, le bassin de Lédignan, le sillon de Saint-Mamert, la Vaunage, le Sommiérois et la plaine de Quissac ;
- les soubergues* du nord et de l’est de Montpellier ainsi que les flancs est du Pic Saint-Loup et l’Hortus.
Certains vignobles de moindre surface se situent dans quelques vallées, plaines et bassins isolés comme dans le sillon allant d’Alès vers Barjac, la plaine de Pompignan, de Ganges, le bassin de Londres et la vallée de la Buèges. Les vignes sont très peu présentes dans les garrigues du Montpelliérais et quasiment absentes des garrigues de Lussan.
Afin de prendre du recul sur l’évolution du vignoble des garrigues, une comparaison des données communales de surfaces de vignes, de volumes produits et de nombre d’habitants a été tentée entre 1900 et 2011 sur 188 communes du territoire des garrigues (source : Indicateur des Vignobles Méridionaux. Charles Gervais 1897 et 1903). À cette époque, le vignoble s’est reconstitué suite au phylloxéra et n’a pas encore profité du mouvement de coopération viticole.
Si la population a été multipliée par deux en un peu plus d’un siècle, les surfaces de vigne ont diminué de moitié et les volumes ont diminué d’un quart.
Mais ces évolutions ne sont pas homogènes sur l’ensemble des communes :
- sur certaines, la population a baissé et la vigne a quasiment disparu. Elles sont presque toutes situées en hautes garrigues et Piémont cévenol comme Brissac ou Conqueyrac ;
- sur d’autres, la production viticole a fortement chuté voire disparu mais la population, elle, a très fortement augmenté. Il s’agit pour la plupart de communes très proches des villes, notamment autour de Montpellier commeJuvignac, Jacou, Clapiers, Saint-Clémentde-Rivière, Boisseron ; Marguerittes, Bernis à proximité de Nîmes ;
- certaines communes ont vu leur vignoble s’agrandir et leur production augmenter, notamment dans l’Uzège et le Pont du Gard (comme Bourdic) et plus ponctuellement du fait de contextes locaux très favorables, en particulier à Valflaunès (autour du Pic Saint-Loup) ;
- d’autres communes enfin ont vu leur surface viticole diminuer tandis que leur production augmentait sensiblement. On peut expliquer ce phénomène par la présence et le maintien de caves coopératives très dynamiques, comme à Corconne ou Calvisson.
Globalement, la partie héraultaise du territoire des garrigues, notamment les alentours de Montpellier et les rebords de la plaine de Fabrègues et de la vallée de l’Hérault, qui concentraient le plus gros vignoble des garrigues, a connu une diminution très importante des surfaces et des volumes produits. Inversement les vignobles de la partie orientale du territoire, rebord des Côtes-du-Rhône, Uzège, Pont du Gard et même la Gardonnenque et le Sommiérois se sont maintenus voire ont augmenté à l’échelle du siècle.

Conclusion
On assiste sur le territoire des garrigues à une véritable mutation de la viticulture. Autrefois orientée vers la production de masse, elle acquiert aujourd’hui ses labels de qualité qui rivalisent avec ceux des grands crus traditionnels. Les fortes contraintes pédo-climatiques ont fait migrer les vignobles vers les plaines durant la période de la viticulture de masse. Ces mêmes contraintes sont aujourd’hui considérées comme des atouts. Cette évolution amène aussi à une meilleure prise en compte du paysage, de l’environnement et de la biodiversité comme faisant partie intégrante de la notion de terroir. Des chartes paysagères émergent. L’expression de Jacques Maby “voir le vin dans le paysage, boire le paysage dans le vin” prend alors tout son sens. Néanmoins, au-delà des grandes transformations de la viticulture à l’échelle du territoire, se cachent d’innombrables démarches individuelles de vignerons : reprise d’exploitation familiale, arrachage définitif de vignes, vente de terrain pour l’urbanisation, diversification, installation de néo-vignerons venant d’horizons professionnels très éloignés, démarche de conversion bio (voire biodynamie), développement d’activités oenotouristiques rattachées à une cave coopérative ou en cave particulière...

Pour en savoir plus, n'hésitez pas à consulter le site https://cave-amateur.fr



Cartes et illustrations















































































































































































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