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LA "GARRIGUE", KESAKO ?


Brève éthymologie:
Le mot "garrigue" est emprunté au provençal "garriga", désignant un terrain aride, lui-même venant de l'ancien provençal "garric", désignant le chêne kermès, un des arbustes les mieux adaptés à ces terrains (Dictionnaire historique de la langue française).
Autre curiosité, on retrouve dans tous ces termes le préfixe gar, de racine pré-indoeuropéenne (au même titre d'ailleurs que gal, kar ou kal) qui signifie "pierre" ou "rocher", présent également, et non sans raison, dans les mots calanque, calvitie, karst, chaux, ou encore Carcassonne. Ne dit-on pas de façon imagée "n'avoir plus un poil sur le caillou" ?


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Une garrigue aride. Vous avez dis "rochers" ?... (Causse de Pompignan-Hérault) (P.Vilain)


De l'histoire d'un mot.
Nos garrigues, dont l’histoire plonge ses racines dans les profondeurs des temps, sont nées du défrichement des forêts par les hommes, lorsqu’ils ont commencé à cultiver des terres ou élever des moutons (Parcourir l'Histoire des garrigues). Les coteaux calcaires de l’arrière pays languedocien supportaient alors une végétation maigre et rase, mélange d’herbes et d’arbrisseaux qui, au fil des siècles, n’a pas arrêtée de se développer jusqu’à s’étaler sur des milliers d’hectares. Les principaux occupants de ces milieux étaient alors des moutons et quelques chèvres.

Pour les hommes, organisés en société rurale et traditionnelle, les garrigues étaient précisément ces terrains arides offerts au bétail, aux cultures. Les bois de chênes verts et les quelques terres arables n’en faisaient pas partie. Les garrigues n’étaient donc pas des milieux naturels au sens « sauvage » du terme, mais des endroits finalement assez pauvres pour les paysans. Quand les naturalistes ont voulu donner une définition scientifique au mot garrigue, c’est à ces paysages qu’ils se sont référés.


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Troupeau de moutons (Viols le Fort-Hérault) (Les Ecologistes de l'Euzière)


Il n’a cependant échappé à personne que depuis ces époques, les choses ont changé… radicalement ! Le pastoralisme est en forte régression, la sociétés est devenue majoritairement urbaine, les paysans de ces zones ne sont plus, et ceux qui restent n’élèvent quasi exclusivement que… du vin. Les paysages ont été affectés par ces changements et ont évolué en même temps. Une question s’impose alors: comment défintit-on une garrigue de nos jours ?


La garrigue vue par… les écologues : un milieu ouvert.
Même chez les naturalistes, des définitions diverses s’affrontent. Il en est une, la plus courante, qui fait cependant consensus.
La garrigue est ainsi décrite comme une « formation végétale xérophile (traduction : adaptée à la sécheresse) très ouverte (composée d’espèces relativement clairsemées entre lesquelles apparaît la rocaille), installée le plus souvent sur un substratum (terrain) calcaire en forme de plateaux ou de collines ». Les espèces sont essentiellement des arbrisseaux et des arbustes bas et plus ou moins disséminés, des plantes herbacées, et quelques rares arbres conservés par l’homme.

Remarque: plusieurs types de milieux naturels correspondent à cette définition, qui vont décliner ce que l'on appelle en jargon scientifique, des "faciès" de garrigue. Chacun cependant, par l'étude des espèces qui le composent, dévoile souvent une origine bien précise à la croisée des patrimoines naturels et culturels (voir les divers paysages de garrigue).


La garrigue... dans le langage courant.
Rien n'est figé et il n'est pas rare d'avoir parfois du mal à déterminer où s'arrête la garrigue dans le paysage, d'autant plus -on l'a vu plus haut- que le mot lui-même ne dérive pas d'une origine scientifique.

D'où certaines extensions dans le langage courant, qui continue de l'utiliser pour désigner tout un tas de milieux variés. C'est notamment le cas pour les pelouses sèches méditerranéennes où prospère la baouque (herbe à moutons), classées en "pelouses steppiques" par les écologues, et qui n'accèdent au stade de garrigue que si arbustes et arbrisseaux y sont observables en nombre.

Quant aux forêts de chênes (verts ou blancs), ou de pins d'Alep, qui se mêlent deci delà sous forme d'îlots à la "vraie" garrigue, il n'y a aucune ambiguïté, elles demeurent des... forêts ! Qui l'eût cru ?


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Premier plan: garrigue à buis - arrière plan: chênaies, ce n'est plus de la garrigue (Masclac-Hérault) (P.Vilain)



L'ALCHIMIE DE LA GARRIGUE

Milieu ouvert par excellence, la garrigue ne se rencontre pas partout ! Pourtant, des espaces ouverts, il en existe ailleurs en France: bocages, landes bretonnes, grands causses, pelouses d'altitude. La garrigue, pour exister, nécessite des conditions climatiques et géologiques bien particulières, propres à la Méditerranée.

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ATTENTION, FAUX AMI !
Ce même type de végétation basse et sous un même climat, se retrouve en... Corse. C'est le célèbre maquis. Spécificité insulaire pour désigner de la garrigue ? Sous ce terme se cache en réalité une véritable distinction sémantique et scientifique. Le sol du maquis n'a rien à voir: il est acide, à l'inverse des sols calcaires, à cause de la roche siliceuse qui le compose (type schistes).
Et qui dit sol acide, dit plantes adaptées. Les essences végétales ne seront pas les mêmes mais présenteront des caractéristiques identiques: basses, adaptées à la sécheresse, etc. C'est le royaume des cistes, des arbousiers et autres bruyères. Le maquis, emblématique de l'Ile de Beauté, est observable sur le continent en région biterroise notamment.



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Maquis corse (David Sepeau-Flickr.com)



UN "NOUVEAU" MOT... FOURRE-TOUT !
Pour mettre tout le monde d'accord et éviter toutes confusions permises par les définitions floues de la garrigue et du maquis, les chercheurs ont accordé leurs violons en validant un nouveau terme désignant des pans entiers de ces deux milieux: le mattoral. D'origine espagnole, le mattoral comprend toute végétation colonisant les espaces ouverts, sur des sols méditerranéens, où dominent des plantes ligneuses de taille moyenne: cistes, genêts, chêne kermès, genévriers, arbousiers, thym et romarin (entre autres) sont de ceux-là. Pelouses, taillis et forêts en sont exclus catégoriquement.

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